Contexte

Dans une petite commune du Jura, les habitants s'interrogent. Certaines plantes commencent à se disséminer sur les bords de routes et prennent davantage de places au fil des années. D'où sorte ces plantes au nom barbare de renouées asiatiques, solidages ou encore buddleia?
Ayant passé toute mon enfance dans cette commune, il m'est venu l'idée en 2017 de proposer bénévolement une étude au conseil municipal afin d'informer la population des risques liés aux plantes exotiques envahissantes et de conseiller, pourquoi pas, quelques techniques pour limiter la prolifération de ces végétaux.

Qu'est ce qu'une plantes exotique envahissante?

Une plante exotique envahissante est "une espèce allochtone (en dehors de son aire de répartition d’origine), dont l’introduction (volontaire ou fortuite) par l’Homme, l’implantation et la propagation menacent les écosystèmes, les habitats ou les espèces indigènes avec des conséquences négatives sur les services écosystémiques et/ou socio-économiques et/ou sanitaires (UICN, 2000 ; Pyšek et al., 2009 ; Genovesi et Shine, 2011 ; Parlement européen et Conseil de l’Europe, 2013).

Quel peuvent être leurs impacts  ?

• Impacts sur la biodiversité. Ces espèces sont reconnues comme la troisième cause de l’appauvrissement de la biodiversité mondiale (Convention sur la Diversité Biologique). Elles peuvent entrer en compétition avec les espèces indigènes.
• Impacts sur le fonctionnement des milieux : changement de propriété du sol, banalisation du paysage
• Impacts sur la santé humaine : peuvent provoquer des brûlures (Berce du Caucase) ou des allergies respiratoires (Ambroisie).
• Impacts socio-économiques : peuvent engendrer des pertes de production, notamment sur les cultures céréalières.

Ces plantes ont une capacité de reproduction ou de multiplications importantes, un développement rapide les rendant très compétitives par rapport aux autres espèces, une capacité d'adaptation forte et une résistance importantes aux perturbations, ainsi qu'une absence ou un nombre restreint de prédateurs naturels.
Je trouve donc qu'il est important de s'en occuper rapidement avant qu'elles ne prennent trop de place dans nos paysages. Etant originaire de ce petit village du Jura, j'ai moi-même vu l'apparition au fil des années de plusieurs de ces espèces et leur croissance. En voici quelques exemples :

Préparations du terrain

Pour préparer le terrain, j'ai d'abord travaillé sur QGIS, un logiciel libre de cartographie. Je n'allais pas me lancer dans l'aventure sans me préparer un minimum. J'ai donc réalisé un petit fond de plan sur base de photo-aérienne (BD ORTHO® 5mBD ORTHO® 5m, IGN), des routes, chemins, bâtiments et cours d'eau (OpenSreetMap), et du découpage administratif communal (OpenStreetMap). Après un peu de mise en forme, voici le rendu du fond de plan :

La zone d'étude représente 672ha. Il faut savoir que les végétaux exotiques envahissants se propagent préférentiellement le long des axes de circulations car les flux de matières sont des vecteurs de dissémination. C'est pour cette raison que l'on trouve énormément de ces végétaux le long de nos rivières et en bord de routes. Les cours d'eau transportent des fragments ou des plants vers l'aval (dans un seul sens / vecteur eau), tandis que les routes disséminent potentiellement dans les deux sens de l'axe (vecteur : humains). Il y a aussi des zones plus ponctuels et sensibles à ces espèces qui sont les zones humides, les mares ainsi que les zones en travaux ou récemment remaniés, les zones de dépôts et de "poubelles sauvages". J'ai donc choisi de concentrer la prospection sur ces axes de circulation et ces points sensibles.
Un cours d'eau temporaire est présent sur la zone d'étude mais celui-ci est en tête de bassin et donc peu sujet à la dissémination par l'amont. J'ai donc préparé des circuits théoriques sur la base de mon fond de plan. Ces circuits passent par les zones ponctuelless sensibles évoquées précédemment.

J'ai choisi de relevés des données ponctuelles de présence de végétaux exotiques envahissants. Chaque point représentant un espace où la plante est présente de façon continue. Cette couche de données ponctuelles possède plusieurs attributs :

Le but de ces relevés est de connaitre assez précisément la répartition géographique des différentes plantes envahissantes afin de caractériser par la suite les stades invasifs et d'évaluer des mesures de gestion appropriées.

Les relevés de terrain

Les premiers relevés ont été réalisé du 08 au 10 mai 2018. J'ai parcouru routes et chemins à la recherche de plantes exotiques envahissantes. Je n'ai pas forcément suivi mes circuits théoriques préférant adapter mes circuits selon la météo et le temps que j'avais devant moi. J'ai utilisé une tablette Samsung Galaxy sur laquelle était installé le logiciel QGIS (lien vers l'appli) pour prendre des données directement sur le terrain. L'avantage de ce matériel est qu'il me localise grace au GPS, je pouvais donc afficher mon fond de plan et me localiser en temps réel. Aussi, la tablette m'a permis d'entrer directement les relevés sur le logiciel SIG, ce qui est un gain de temps lorsqu'on rentre du terrain! Voici la carte des relevés réalisés :

En trois jours et 45 km de routes et chemins parcourus, j'ai pu relever 49 données ponctuelles dont 11 points restent à vérifier. Chaque plante exotique rencontrée a été inscrite sur la tablette, j'ai pris des photos de chaque massif et annoté quelques remarques. Certaines plantes m'ont posé des problèmes pour les identifier. J'ai donc pris des échantillons que j'ai chercher à reconnaitre en rentrant du terrain. Pour les points où j'ai encore des doutes, j'ai inscrit un "?" et je repasserais dans quelques semaines pour mieux les identifier.

la suite

La suite de l'étude passera par la réalisation de nouveaux relevés en juin-juillet 2018 pour prospecter les mares, ruisseaux et chemins non empruntés. Ensuite, viendra le temps de la rédaction du rapport. J'ai déjà débuté la rédaction qui devrait être bien avancée d'ici quelques mois. Ce rapport portera sur l'état des lieux des plantes exotiques envahissantes et sur des stratégies de gestion de ces espèces. Je pense que je partagerais sur ce blog le rendu final de l'étude.

Enfin, je mets à disposition ci-dessous quelques documents si le sujet vous intéresse :

• UICN (2016). Les espèces exotiques envahissantes sur les sites d’entreprises, Livret 1 : Connaissances et recommandations générales lien
• UICN (2016). Les espèces exotiques envahissantes sur les sites d’entreprises, Livret 2 : Identifier et gérer les principales espèces lien
• Concept.Cours.d’EAU SCOP et TEREO (2016). Savoirs et savoir-faire sur les populations exotiques envahissantes végétales et animales et préconisation pour la mise en oeuvre des SDAGE (réf. 062). Etude réalisée pour le compte de l’Agence de l’eau Rhône-Méditerranée Corse. lien
• Sarat E., Mazaubert E., Dutartre A., Poulet N., Soubeyran Y. (2015). Les espèces exotiques envahissantes. Connaissances pratiques et expériences de gestion. Volume 1 - Connaissances pratiques. Onema. Collection Comprendre pour agir. 252 pages.lien
• Ministère de la Solidarités et de la Santé (2016).Cartographies de présence de l’ambroisie en France lien
• Ministère de la Transition écologique et solidaire (2017). Espèces exotiques envahissanteslien
• site du Groupe de Travail Invasions Biologiques en Milieux Aquatiques (GT-IBMA), lien

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